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  • Photo du rédacteurSabine

Xavier Mussat - Les pistes invisibles



« En vingt cinq ans, je n’ai jamais rien laissé au hasard. J’ai contrôlé mon effacement. J’ai disparu jusqu’à me propres yeux. »

Tourner les pages, plonger dans le hors-norme, dans ce qui ne raconte pas, dans l'effacement et l'invisible, la disparition d’un homme aux yeux des autres, à ces propres yeux. Tourner les pages comme on tourne et contourne le silence, la survie et le tenir encore. Tourner les pages et pénétrer dans un monde inconnu, imprévisible, mystérieux. Partir à l’aventure comme on entreprend de marcher vers ce que l’on ne connait pas, ce qui demeure entre les ombres et les vivants, entre la mort et la vie, l’ultime frontière de l’invisible.

Partir loin jusqu'à se rendre transparent aux yeux des autres, à ses propres yeux. Partir loin dans la verticale, l'horizontale, l'oblique, l'ellipse, la géométrie des lignes et des cercles, la beauté du chaos des roches et des ruisseaux, d'une forêt sauvage où le règne végétal explose de gigantesque. Faire face à l’immobile mobile, au silence, au seul bruit d’un monde où l’homme n’est qu’empreinte hostile et désastreuse, vengeresse, hargneuse, colonisante. Partir loin comme une rupture au monde, à ce qui est incompréhensible et s’aventurer dans la démesure, hors des sentiers, entendre le chaos, les roches, la forêt entrer en soi, faire corps avec les ondes, les courbes, les sens. N’être que survie jusqu’à l’invisible, jusqu’à l’effacement effacé. Rompre avec le genre humain, avec la machine qui avale les esprits, rejette les particules indigestes. Disparaitre sans le vouloir mais avec la volonté de ne pas revenir, de faire corps avec un autre monde. Disparaitre 25 ans. Et se mélanger au reste, à l’inexplicable.


Invisible.


« Il suffit d’ignorer la présence de fantômes pour cohabiter avec eux sans en être effrayé. »


Xavier Mussat et son seul dessin, son trait, son crayon comme le prolongement de sa pensée, de ce qui fait chaos et silence, force et fragilité, sens. Contourner la bichromie comme on contourne l'espace et la promiscuité. Entrer par effraction dans les failles et les vides, s'abîmer au souffle puissant de l'éloignement. Articuler la narration tribale poésie prose comme un réveil brutal au monde, à la morsure des autres, des crocs des chiens, des chasses à l'homme. A un homme. Déployer la force du mystère et de l'émotion inattendue, inespérée. Faire entendre une voix comme une histoire, celle d’un homme dont on ne sait pas grand chose, dont on ne connait ni son visage ni ses traits. Un homme disparu. Un fantôme. Un portrait invisible, inexploré.


Un dessin dans un univers pris à contre-pieds, un univers où règne chaos et géométrie, chahute l’intellect comme les sens, mise sur le mystère et la curiosité de comprendre, de désorganiser nos sens, d’aimer une disparition, l’effacement nécessaire au monde. Une bichromie-masse orange bleutée où des silhouettes, des ombres ou des matières minérales, végétales, animales se métamorphosent sous nos yeux et nous amène à l’inaccessible chaos sublime et nécessaire.


Magistral. Il y a vraiment du grand chez Xavier Mussat. Du grand là où le silence, les sens, la poésie incarnent ce que peut offrir ce neuvième art.


« Pour bien disparaître, il ne faut pas être cherché. Devenir invisible, ça n’est pas disparaître, c’est se mélanger au reste.»


Et relire Horst



Les pistes invisibles

Xavier Mussat

Albin Michel




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