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Photo du rédacteurSabine

Borja Gonzàlez - The black holes

Dernière mise à jour : 12 mars 2019


« -Tu es mort ? - Snif.  Hein ? - Tu n’as pas l’air mort ? - Morte ? Non ! Bon… à vrai dire, je ne sais pas. - J’y suis ! Tu t’es fait assassiner ! Et tu as oublié que tu as clamsé. Raconte du poison ? Des aiguilles dans le thé ? - Dis, tu veux me foutre la trouille ou quoi ? »

Alors ne cherchez pas à comprendre l’histoire de cette bande dessinée. Ou du moins pas à sa première lecture. Commencez à vous laisser prendre, griser par cette atmosphère complètement surréalisme, loufoque, à la limite d’une poésie digne des plus grands auteurs baudelairiens époque poison et évanescence névrosée, digne d’une Edgard Poe et son côté fantastique, ses jeux de miroirs et de quasi horreur. Ne cherchez pas à vous confronter à une vie, une existence ou une fiction quelconque. Il n’y en a pas. Ou du moins pas de celle que vous croyez !

Dans The black holes de Borja Gonzalez, tout est jeu. Un jeu d’époques, de miroirs, de collisions frontales entre une enfance et une adolescence, entre deux mondes qui semblent opposés et qui se rencontrent. Un univers où  la création et la liberté deviennent les maitres mots, les clés pour comprendre et passer les pages, entrer dans le rite fantastique et merveilleux de l’histoire. On se laisse surprendre par une imagination féconde, trois héroïnes qui traversent les époques, nous baladant dans un 19ème siècle semi victorien post romantique et un 21ème siècle qui se gargarise aux sons électros d’un rock punkesque. C’est diablement bien mixé et nous laisse plus d’une fois dans un merveilleux mystère à nous couper le souffle et le langage.

Ainsi on erre près d’un lac où un squelette vient narrer sa peine de savoir si il est mort ou pas, si sa vie se résume à longer les rives et attendre les nuits de pleine lune pour voir les étoiles scintiller, exister. Parce que « six pieds sous terre, c’est plus dur à imaginer ». Mais surtout parce que de chez lui,  « je les vois pas bien, c’est tout. Il y a une espèce de brume qui voile le ciel. ». Car oui, la question vient rapidement : où est ce chez lui ? Qui est ce fantôme ? Et d’ailleurs en est-ce un lorsque quelques pages suivantes, l’aventure fantomatique flirte avec deux siècles de plus, sous les auspices d’un groupe de jeunes filles en fleurs de l’ordre des punks ! Vous avez compris … Non. C’est normal. Moi non plus.


« J’avais la sensation de ne pas être là où je devais être. Comme si tout allait trop vite et que j’étais loin derrière ou peut-être l’inverse mais peu importe désormais. »


Et pourtant, c’est l’envie de continuer qui nous titille, de poursuivre cette histoire, de se laisser griser par cette atmosphère où l’enfance s’enfuit laissant place à la mélancolie et le romantisme noir, mystique. On frôle les ténèbres, joue avec le mystère, entreprend quelques pas de côté en revenant deux siècles en arrière, à la recherche du sauvage, de la révolte, d’une désinvolture adolescente où  l’ordre est à démystifier. Rien ne semble contraire, tout s’imbrique entre ces deux siècles et ces jeunes filles qui se rencontrent au détour des années. Un récit où on en vient à se demander qui est qui, où en est on, qu’est ce cette histoire ? La rébellion nous emporte, laissant tous nos préjugés intellectuels sur le côté. On entre par la grande porte dans la création même, dans la recherche d’une musique poétique désinvolte et joyeuse. Le graphisme est beau à se damner. Tout est en sujétion, en émotion. On évoque les bois sauvages, les rives d’un lac mystérieux, les fonds de cave d’une maison victorienne où les époques se mélangent. Le trait est rond, souple, tendre et contraste avec l’histoire loufoque, j’ose barrée. Il assouplit, rend encore plus mystérieux le genre. L’étrange flirte dans les cases et la narration.  On entre dans le jeu comme on entre dans l’histoire. Les deux se répondent et deviennent addictif, rieur, poétique, onirique.


Bref un vrai objet bullesque non identifié qui frise avec le merveilleux, le fantastique et une poésie qui donne ce souffle, cette liberté, à la beauté. Une ode au merveilleux et au fantastique, au temps, à la noirceur et la mélancolie, à la création et l’esprit qui est né, sur notre existence à faire des bonds en arrière, rechercher notre âme errante et nous démultiplier sous les affres d’un univers révoltant.

« On peut jouer à autre chose ? On peut jouer à tout ce que tu voudras. »

Les Bulles de la semaine sont à retrouver chez la douce Moka


The black holes Borja Gonzalez Dargaud

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