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  • Photo du rédacteurSabine

Serio et Igor - Gauloises



« il avait commencé tout gosse. D’abord deux ou trois livraisons, et puis, un peu plus tard, son premier mort. Presque par hasard. »

Tout est connu d’avance. On le sait. A la fin, il ne restera que celui qui a tiré en premier, qui a fumé la gauloise avant l’autre et l’a jetée à ses pieds. Une histoire d’hommes. Une histoire de trop. L’histoire universelle de celui qui tire et celui qui meurt. Un polar, l’histoire de mafieux, de meurtres et de règlements de comptes, d’une brute napolitaine aux regards sombres venant du pays de la mélodie et d’un mafieux aux mains carrées issus d’une ile aux parfums ensoleillés.


Une histoire en cinq rounds. Une pièce pour tifosis égarés, un thriller à la vendetta, un film jazzy de gangsters, la brute et le truand, le bon n’existant pas, remis dans un contexte années 50 d’une Italie qui renait après les périodes sombres. La brume des matins napolitains, des gauloises grillées, le linge sur les cordes, les gares ferroviaires aux courbes élaborées, les lumières de Sicile, les premiers meurtres, les histoires oubliées, les sacs poubelles où des corps gisent sans savoir qui les a tués, la prostituée au corps voluptueux, les Mercédès, les Alfa, les berlines au vaste coffre abritant des corps à la tête trouée. Une histoire de gangsters et de mafieux, de petites frappes qui au fil du temps vont se faire de l’ombre, devenir tueur à gages, tueurs tout court.


Borsalino et imperméables.

Gueules impertubables.

Gauloises.

Poum.

Igort et Serio ont produit un petit chef d’œuvre taiseux, à l’art minimaliste. Dans un graphique ultra sensible, les touches de bleus viennent se frotter à la luminosité du soleil italien. Les regards se dessinent entre deux couvre-chefs digne de la période des grands films de Cincinnati. Le crayonné vient effleurer, marquer, ébaucher une atmosphère d’une histoire pas comme les autres, d’une rencontre improbable entre deux bandits, des mafieux aux regards de braise et aux cœurs tendres.


Il faut se laisser prendre au jeu du découpage, des architectures nébuleuses, des lieux et scènes de rues, à la réalité et chapitres morcelés, aux grands écrans, aux pages scénarisées. On ne sait plus trop où et comment, on est entré dans l’histoire, seules les gauloises fumées donnent le ton, la piste, la poésie d’un jeu de cache-cache. Le trouble règne dans une grande douceur, une poésie dessinée et racontée. Seule la violence nous revient par à coup, sans chercher à juger. Juste le Pom d’un pistolet et une scène de crime à peine dévoilée. Un contraste saisissant, voluptueux, amoureux, narratif dessiné.


Un polar mafieux digne des années 50 envoutant et onirique. Poétique.



« Ils se regardaient immobiles, pas très loin l’un de l’autre serrant l’outil, prêt à s’en servir. C‘était un duel en règle, ils le savaient tous les deux. »

Et relire les cahiers japonais ou russes d’Igor et Rhapsodie en bleu de Serio.



Gauloises

Serio (dessins) et Igor (récit)

Traduit de l’italien par Hélène Daunol-Renaud

Futuropolis





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