« Et ils risqueront encore leur vie, puisqu'il faut des hommes pour nourrir la bête hideuse qui n'est jamais rassasiée... La bête c'est la guerre, la bête c'est nous. Nous ne sommes plus ce que nous étions... Nous ne serons plus jamais les mêmes. »
Tant qu’il y aura des hommes, il y aura des conflits, des guerres, des terres à sacrifier et d’autres à posséder, des territoires à libérer. Tant qu’il y aura des hommes, il y aura des volontaires pour exécuter les basses et nobles taches, des désignés d’office, des résistants, des perdants, des victorieux, des chats hurlants, des complotistes, des guerriers et d’autres qui ne le seront jamais.
Puisqu’il faut des hommes.
Des hommes, à la gorge nouée, sauvages, le visage fermé, où l’ultime ne se mesure pas, ne se dévoile pas, se tait à jamais.
Il y aura ceux qui partent. Ceux qui reviennent. Ceux qui ont vu, appuyé ou non sur l’arme portée à la main, donné le coup fatal. Les victorieux solitaires, muets, brulés aux feux, bruits, canons, gaz, aux combats, aux regards et aux gestes de ceux restés au pays. Des hommes montant au front et revenant meurtris, dé-civilisés.
Puisqu’il faut des hommes.
Des hommes qui s’en vont et reviennent victorieux.
D’autres à tout jamais condamnés.
Puisqu’il faut des hommes.
« Parfois il est des secrets qu’il vaut mieux taire »
Le schéma est vite fait, la caricature facilement dessinée, le visage buriné du kamikaze idéalisé. Mais comment en revenir ? Comment être cet homme, ce héros quand il a fallu appuyer sur la gâchette, enlever la vie, laissé aux pays la femme aimée, un frère adoré, une famille qui n’a pour mot qu’une terre à défendre, une terre à ne jamais vendre au moindre planqué. Comment être le héros quand de héroïque il ne peut être. Accepter les sarcasmes, les regards dédaigneux des victorieux qui n’y sont pas allés, des cireurs de chaussures pervers, des voleurs de vérités et de femmes laissées.
Pelaez et Pinel couvent un conflit qui n’est toujours pas cicatrisé, encore regardé avec incompréhension, animosité. Une guerre d’Algérie qui n’a pu construire une histoire d’hommes et de paix. Une histoire qui donne à réfléchir sur ces héros aux visages fermés, à ceux qui ont vu le feu, se sont brulés, quelque soit la terre, quelque soit le pays à défendre, victorieux ou perdants. On pourrait reprocher certains raccourcis, des caricatures un peu trop vite dessinées, épanchées dans les mots et les courbes données, « le bon, la brute et le truand, la belle et le frère looser magnifique ». Des personnages un peu trop vite croqués, tracés mais qui donnent pourtant tout cette sensibilité, cette foudroyante histoire, ces questionnements et bouleversements, les marques indélébiles, les cicatrices et autres traumatismes.
Une bande dessinée efficace et dérangeante.
« Le regard des autres, pas vrai ? Ça peut être gênant, et oppressant »
A lire chez Noukette.
Dès que je la vois disponible à la bibliothèque, je l'emprunte.
Oh que c'est intrigant. J'aime être dérangée dans les BDs.
J'ai envie d'en savoir plus, tu en parle bien!
J'aime de plus en plus l'idée de lire un texte ou un album qui puisse déranger...
c'est toujours un plaisir de te lire, et à chaque fois tu m'importe, voilà qu'un livre de plus s'ajoute à ma liste, mais pas tout de suite. J'ai pas le moral aux histoires de geurre