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  • Photo du rédacteurSabine

Pei-hsiu Chen - Somnolences


« Quand on éteint sa lampe après un certain temps, les yeux s’adaptent à l’obscurité. […] A cause des vagues, je n’entends pas la voix des autres mais peut-être que personne ne parle. »

On pourrait penser que ce roman graphique est d’une banalité quotidienne somme toute classique, que sous les traits faussement crayonnés de Pei-hsiu Chen se dresse un portrait de la femme Taïwanaise dans une version contemporaine. Mais c’est mal comprendre ce qui se lit entre les cases, se joue dans les couleurs, dans la douceur acidulée du crayon de couleur et du délavé.


Derrière ces dix portraits, apparait celui de l’auteure et les petits événements quotidiens qui parcellent sa vie. On entre dans son intimité, dans les lieux, l’histoire d’une ile qui tente de se démarquer de son passé chinois sulfureux. On y croise des gestes, des faits, des petits aléas d’une vie réduite entre un boulot et quelques échappées, le portrait d’une femme loin de la caricature passéiste, tournée vers un monde qui bouge, offre des amours et non pas des mariages comme la coutume aurait pu laisser supposer. Les balades dans la province de Taipei nous enveloppent d’un onirisme propre aux cultes et valeurs. On flirte avec le temps, la lenteur, les silences, le monde qui bouge, s’oppose entre hier et aujourd’hui, les relations et les difficultés, le quotidien.

Tout n’est qu’effleuré, simple, fugace comme une caresse, une tranche de vie offerte mais jamais vraiment partagée en profondeur. Pudeur, discrétion. Des touches de couleurs légères se mélangent au gris urbain, contemporain, contrasté, morne comme pour mieux exprimé cette douceur, ce retrait sur une vie vide, blasée, douce-amère, sucrée-salée.


Tout est tangible, fragile, sensible, l’histoire quotidienne se heurtant à l’histoire hantée. Tout est respiration, secret distillé, contemplation, retrait, délitement. Et c’est cela qui est beau, doux. Ce temps qui s’espace, s’échappe, joue sur les cases, dans les dialogues, sur les tons et les couleurs. Ce temps qui prend son temps, nous offrant la grâce d’un voyage auprès de dix femmes, de Pi-hiu Chen.


Un temps comme une somnolence.


« Maintenant, ce n’est plus comme quand j’avais 19 ans. Il faut faire attention.[…] Mais au moins j’ai la force de me séparer des êtres et des choses que je n’aime pas vraiment. »


Somnolences

Pei-hsiu Chen

Acte Sud Bd




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