
« Clémence Janet est née le 02 septembre 1879 à Tournus (Saône et Loire). Sa mère était couturière et son père tailleur de pierres. Elle était ouvrière en soie. Elle s’est mariée le 27 février 1897 à Lyon (5ème arrondissement) et a donné naissance à deux enfants, Antoine (29 août 1897 – 14 septembre 1897) et Louis (13 février 1900 – 23 juin 1977). Elle est morte à Lyon (2ème arrondissement) le 15 juin 1901. »
Oublier Clémence. Oublier. Ou plutôt non. Ne pas oublier. Clémence. Née le 02 septembre 1879 à Tournus (Saône et Loire). Décédée le 15 juin 1901 (Lyon). Oublier une vie, sa vie, celle de Clémence, celle d’une femme, une page d’histoire intime, microscopique, infime, invisible. Une page telle celle d’une ouvrière en soie, travailleuse laborieuse de filature, de construction au fil des mots, des bobines et de la vie d’un couple. Oublier Clémence. Oublier Clémence. Oublier son portrait, son état civil, son identité. Oublier son humanité, l’humanité, son histoire, sa vie, ses souvenirs, la banalité quotidienne, son destin, l’anonymat d’une femme, celle d’une fileuse de soie, celle d’une page d’histoire infime, d’un monde.
Oublier Clémence.
Ne pas oublier
Clémence.
Ne pas oublier sa vie, son identité, le fabuleux hasard des mots et d’une femme. Clémence. Née le 02 septembre 1879 à Tournus (Saône et Loire). En garder une trace, un souvenir, quelques lignes, une empreinte, un destin. La ressusciter, lui donner chair, matière en cinq phrases d’introduction, d’état civil. Clémence. Énigme à la vie brève et muette, entre bobines et fils, vide de la grande histoire, filature de celle de l’intime. Tracer les archives, déployer une généalogie, une enquête. Explorer sa vie, les mots, l’écriture, l’effacement, l’existence, les combles vides et blancs, sa silhouette.
Oublier Clémence. En écrire un poème, une narration, un roman. Lui offrir une graphie, une empreinte, le geste des mots comme les gestes d’une fileuse, un portrait au fusain, à l’encre de chine, lui offrir contour et ampleur, vie et temps, place, pièces de puzzle, un visage recomposé.
« il y a si peu de Clémence dans les livres d’histoire »
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