top of page
  • Photo du rédacteurSabine

Lola Nicolle - Après le fête

Dernière mise à jour : 18 oct. 2019


« Nous vivions en somme, une grande fuite en arrière qui nous protégeait de cette époque incertaine sur laquelle, ivres et élégants, nous dansions »

Certains romans sont faits pour vous. Ils entrent sans faire de bruit, se posent entre sur votre cœur, le corps, vous enveloppent de leurs mots, leurs phrases, d’une poésie contemporaine où l’âme et l’errance mélancolique trouvent leur voie, se font entendre sans jugement ni excuse. Juste parce qu’il est nécessaire de laisser une place, sa place, de trouver un endroit où l’on puisse être, se reconnaitre, se sentir protéger. Juste pour laisser entendre le bruit du temps, du monde, de ce passage d’un état de jeune adulte à celui de l’adulte défini comme tel. L’adulte après la fête, après l’euphorie des grands espoirs, de la gloire, des illusions rêvées qui s’évaporent comme s’évaporent les fumées, les oiseaux de passage, les renoncements, les accidents qui font « dérailler le quotidien ».


Lola Nicolle a réussi l’exploit de parler de ce moment de bascule, ce moment où les rêves ne tiennent qu’à un fil, où les désillusions et les renoncements sont les portes de secours, des voies sans issues, de garage, où tomber de tout son corps est tellement facile qu’il en devient dangereux, où l’équilibre est précaire, un nid pour oiseaux perdus.

De par son écriture, sa grâce mélancolique, sa délicatesse silencieuse et poétique, ses cris et rages qui s’échappent, les larmes qui jaillissent à l’improviste, on entre dans son monde, dans ce monde où la fête n’est plus, où l’euphorie des grands boulevards, espoirs se terminent en impasse, où la lumière revêt son habit de nuit noire, où la lassitude gagne comme se termine une partie de poker, dans le tumulte des cartes abattues redistribuées.


On pourrait penser qu’Après la fête est un roman générationnel, à la limite de cette frange d’une jeunesse parisienne, un brin dorée, qui ne connait que la fête et les possibles .tumultueux aisés. Cela serait tomber dans le cliché de la facilité. Oublier que derrière cette façade se cache les lendemains perdus, les euphories des gueules cassées, des gueules de bois, les cris de ceux qui ne crient plus, les rêves de ceux qui ne rêvent plus, les mélancolies de ceux qui ont pour croyance les doutes, le manque de confiance, d’espoirs flétris, fanés. Comme si il était plus facile de se battre que de tomber, comme si la colère, la rage, la violence devait être fer de lance d’une place à trouver, d’un état à être, d’un possible à exister, l’ultime parade à la mélancolie, à cette place que l’on cherche tant, de cette fête qui se termine.


« Longtemps nous sommes restés au milieu de l’appartement, dans le creux de nos bras et dans ceux de la nuit. Et les frontières de nos vies se dissipèrent. »

Certains livres sont faits pour vous, nous. Certains livres agissent sur vous, nous. Certains livres nous donnent le droit de crier derrière la fenêtre, de se souvenir qu’après la fête, les lumières peuvent devenir plus sombres ou grises mais qu’en aucun cas elles ne deviennent invisibles. Certains livres nous donnent le droit de se sentir seul(e), de trouver sa place dans cette solitude dorée d’un monde qui oublie les autres, d’inonder d’un seul coup son visage de larmes et de ne pas en avoir honte. Comme une évidence. Comme une poésie qui vous cueille.


Comme des mots qui vous guident dans ces moments où le fil du funambule tangue dans le vide, où après la fête, la vie continue encore un peu et révèle d’autre parfums, d’autres possibles. D’autres lumières. Une place. La sienne. Celle qui fait de nous le gagnant d’une simple vie. Une vie après la fête.


« La vie ressemble à une feuille de papier. Parfois pour avoir moins mal, on voudrait en effacer les plis. Les souvenirs comme des origamis. Puis, on voudrait retrouver une surface vierge, prête à prendre une nouvelle forme. On a beau tenter de l’aplanir, il reste toujours les marques des pliures anciennes. Heureusement. »

Après la fête de Lola Nicole fait partie de la sélection des 68 premières fois, édition 2019. A retrouver sur le site, toutes les chroniques des éditions passées et de celles en cours ainsi que les diverses opérations menées.



Après la fête

Lola Nicolle

Les Escales

20 vues0 commentaire

Posts récents

Voir tout
bottom of page