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Jean Philippe Blondel - Le groupe


« On a tous été très secoués. Par toutes les histoires. Les fausses. Les vraies. C’est comme si nous avions été projetés à l’intérieur d’un film trop réaliste. Juliette et Camille s’essuyaient les yeux. Boris fixait le plafond pour contrer l’émotion. Mais le plus troublant, c’était Mme Grand. Alors, elle, toutes les digues ont lâché. Elle était carrément en PLS. C’est bizarre de voir un adulte pleurer. » 

Jusqu’à là, Jean Philippe Blondel n’avait été qu’un prof d’anglais parmi tant d’autres, un prof d’un lycée de province qui cumulait à sa fonction d'enseignant, celle d’écrivain reconnu et reconnaissant. Deux tenues différentes qu’il pensait impossible d'endosser ensemble, d‘exposer. Jusqu’au jour où Marion Grand, professeur de philosophie et collègue de JP Blondel, lui fait part de son envie de constituer un atelier d’écriture en sa compagnie, basé sur le volontariat des élèves, une heure par semaine durant six mois de la vie scolaire.

D’abord craintif et se posant mille et une questions sur l’organisation et son rôle de professeur-écrivain, Jean Philippe Blondel accepte. Tous les deux se lancent dans une aventure où ils ressortiront bouleversés, tremblants et mis à nus par la vérité, la sincérité de ceux qu'ils auront côtoyé durant cette année. Le résumé de ce livre pourrait s’arrêter là. Sans plus de mots, sans plus d’intrigues. Mais loin s’en faut. 


Ce qu’il ressort de ce récit est une notion d’humanité, de dépouillements extrêmes et de rêves, d’ados acceptant de tomber le masque, de livrer à un groupe, leurs plus profonds ressentis.  Autour d’exercices séances, on entre dans ce monde, dans le monde des mots, de la force qu’ils procurent, donnent, offrent.  Filtrant une par une les émotions, les non-dits, les boules au ventre, tremblant, se livrant sans fard ou maquillage, ils avancent, se livrent, ouvrent leur cage, se délivrent, entrent dans la lumière de la vie. Adultes et adolescents ne deviennent plus qu’un, un groupe qui accepte de jouer le jeu d’un travail d’écriture.

 

« Ecrire des choses qui viennent des tripes, des mots qui viennent fouiller autour du cœur et qui descendent dans le foie et les intestins, des paragraphes qui coulent dans les veines et dans les artères, des textes qui donnent un sens à toute cette biologie en nous. »


On ressort de cette lecture avec une envie folle de prendre le crayon, le stylo, le feutre, la plume, de déposer les mots. On ressort avec cette énergie, le besoin de se mettre à nu, de se livrer sans contrainte, sans honte ou humiliation, ce besoin viscéral d’avancer, d’être fière de soi, d’eux, d’elle qui de ce stylo qu’elle tient, remplit ses carnets pour devenir, faire un de ses rêves, une possibilité, sa possibilité, son chemin.


« Tu m’as permis de me rendre compte, Emeline, que je ne serai jamais écrivaine. Je pourrai écrire, j’écris déjà et je vais continuer, un journal intime, des textes courts, quelques poèmes – mais j’ai compris maintenant que ce n’est pas la voie par laquelle j’exprimerai mes émotions. […] Je vais m’intéresser à d’autres moyens. La photographie, peut-être. Oui, la photographie, c’est bien. Mais toi, Emeline, avec ta bizarrerie, avec cette démarche hésitante, ces mots que tu choisis après en avoir regardé les contours et les toutes les facettes, tous les éclats qu’ils renvoient dans le soleil et la lumière, toi, il faut que tu persévères. Il y a des joyaux dans les sacs que tu transportes et tu ne t’en rends pas même pas compte. »


Un livre qui nous prend là au plus profond de notre chair, de notre cœur, de notre esprit et qui ne nous quitte pas. Un livre où grâce à ces dix adolescents et ces deux adultes, à ce groupe, on apprend à faire corps avec soi, avec eux, avec ce crayon et la force beauté qui nous habite, nous revêt, nous fait avancer. 


« C’est important les rêves, non ? C’est ce qui nous permet d’accepter la réalité. De l’appréhender. De la jauger. Et de la transformer aussi. Je rêve d’écrire un roman. J’espère que j’y parviendrai un jour. En attendant, je m’entraîne avec eux. Et m’entraînent à leur suite. »


Le groupe

Jean Philippe Blondel

Actes Sud Junior

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