Autre problème à résoudre : les nouvelles parutions. Le ministère lui en avait fait parvenir une vingtaine. Elles étaient en haut, à l'appartement ; il en terminait la lecture. Où allait-il pouvoir les mettre ? ... Il répugnait à leur donner la place des vieux livres. Ceux-ci, même s'ils n'étaient empruntés qu'une fois par-ci par-là , étaient aussi importants à ses yeux que les livres récents. Et puis, il ne fallait pas oublier que, nouveaux ou anciens, les livres passaient de main en main, ce qui avait permis de créer des réseaux de lecteurs.
J’aimerai vous parler d’un livre. J’aimerai vous en parler tout doucement, comme l’émotion procure, ce doux moment dans lequel on s'enroule chaudement dans les pages. J’aimerai vous parler d’un livre, d’un roman qui ne fait pas de bruit, prend le temps de s’arrêter dans chaque village traversé, dans chaque page lue, auprès de chaque personne croisée. J’aimerai mais je ne saurai.
Il y a des livres qui laissent une empreinte, un goût de sirop d’érable, un trésor de richesses, que l'on aime ressortir de sa bibliothèque pour se poser délicatement dans nos sacs, sur notre table de chevet, entre nos mains… Des livres qui ne nous quitterons jamais. Comme un baume sur nos cœurs, une petite musique, une chanson douce, un air, un p'tit bonheur ramassé
Parce qu'il y a des livres comme ça. Des livres qui parlent des livres, de ces mots marquants, ces rencontres uniques, ces temps de pause où la vie, les tempêtes, les questionnements s'éloignent dans la douceur d'un automne qui passe.
Oui il y a des livres comme ça.
Des livres où l'on pourrait croire que le vide est rien, que l'histoire lue parait désuète, classique. Mais après tout qu'importe. Qu'importe si ce livre lu procure le rôle de glisser du bonheur, de la poésie, un instant fugace de répit et de ces petits riens qui parfument la vie. Des livres où l’on a envie de savourer les chapitres, les pensées, les silences, la beauté, la vie qui résonne, la musique de la chute des feuilles, du temps changeant, l'humeur mélancolique, la lenteur, la sensibilité, la douceur, la lumière d'automne jouant sur les ombres et les couleurs.
Sans question.
Sans précipitation.
Juste une histoire, une histoire d'une tournée d'automne, la dernière le long des rivières, des fleuves, des rivières, des paysages et contrées du Québec. La dernière avec ses hauts et ses bas, avant le grand hiver, la fin annoncée, les derniers moments, avant que sonne la fin de la tournée.
Des livres comme des classiques qui nous protègent et qui malgré les années, restent ces phares, ces moments de lectures où l'on aime se retrouver, des réseaux de lecteurs dans lesquels on se reconnait.
« C'est vrai que les livres nous protègent, dit-il, mais leur protection ne dure pas éternellement. C'est un peu comme les rêves. Un jour où l'autre la vie nous rattrape. »