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Jacques Houssay - Cette tendresse qu'on attend dans la nuit



« Ne pas retenir la vie. Aller au bout de la terre, après des kilomètres de mots et de silences. Quand l'horizon gris, et quand la terre dissoute, savoir une évidence »

On ne sait jamais lorsqu’on ouvre un livre, où vont nous mener les mots, l’écriture, l’histoire, si ce qu’on découvre, l’incandescence, le feu, le brasier nous maintiendront au dessus du vide, si la tendresse évoquée ne sera pas qu’une vaste supercherie, un poème tronqué, une boite en fer blanc vide. On devrait se méfier des souvenirs et de la jeunesse qui embrasent la vie, le vide, le néant, explosent à la figure comme explosent les éclats d’une bombe, comme explose la vie qui ne tient qu’à un fil.


On ne sait jamais.


On devrait se méfier des caresses inabouties, des mots qui s'engouffrent, prêts à ne laisser que l'ombre d'une vie derrière soi quand la vie se résume à de l'espoir rougeoyant dans le vide. On devrait se méfier des bouts de tendresse, celle d’avant la nuit, juste avant que les caresses se perdent entre chien et loup, avant que plus rien ne reste, des neiges qui recouvrent les corps trop tôt envolés. Ces bouts de tendresse qui brûlent les ailes des papillons, empêchent le regard d’escalader les murs trop hauts, les chambres de s’ouvrir sur d’autres vues qu’un horizon fermé, consume la jeunesse, la folie de l’amitié, les boîtes en fer blanc et les bouffés d’amour liées, les trésors photographiés. On devrait se méfier avant que les cimes embrasent un tout et que les jambes n'en finissent pas de se balancer au dessus des vides. Parce que la tendresse n'en finit pas de se consumer. Parce que la nuit, sa pénombre sombre, brillante. Parce que la fureur d'un monde, son bruit, les écorchures et les vertiges.


Cette tendresse qu'on attend dans la nuit et qui n'arrive jamais.


« La tendresse c'est peut-être pas autre chose que l'odeur du shampoing. »

L'enfance, l'adolescence, l'homme qui grandit, devient. L'amour, la mort, l'amitié, la solitude. Ce qui se vit vite, déborde, s’enferme, se caresse, devient, meurt. La fureur de vivre comme souffle, pulsation cardiaque.


Mot. Point. Mot. Point. Poing. Bombe, explosif, déflagration.


Une bombe qui éclate à la figure, n’en finit pas de nous maintenir en vie malgré les vertiges et les vides, malgré les brèches, les cicatrices, les failles, les voitures qui défilent, la vitesse, la neige. Une flamme qui ravive la beauté qu'on ne peut se résoudre à classer dans un tiroir, derrière des barreaux ou au fond d’un trou. Une langue à caresser la tendresse, celle qui fuit, qui précipite les événements, renforce l’amitié. Une poésie vertigineuse, rageuse, douce, une ivresse, celle des cimes qui montent, descendent, montent, descendent. Une langue d'une puissance évocatrice sensible adoucissant les cages fermées, brûlant la peau, les yeux, la rétine.


Un livre, une histoire, une écriture d’une tendresse folle. Une tendresse qu’on espère, un espoir retenu dans une main fermée et qui part dans des éclats parce que furieusement vivant. Furieusement tendre. Le genre de tendresse qu'on attend dans la nuit et qui ne vient jamais.


Incandescent. Poétique. Foudroyant.


« La fureur de ce monde ne sera jamais de taille. »


Cette tendresse qu’on attend dans la nuit

Jacques Houssay

Le Nouvel Attila


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