« Je vais vous donner un conseil. Pour que les prochains jours de pluie ne soient pas trop pénibles pour vous. Prenez le temps de regarder les gouttes tomber et imaginez tous les kilomètres qu’elles ont parcouru. Vous verrez, le temps de penser à tout ça et il sera déjà l’heure de manger. Pour moi ça marche du tonnerre. Aujourd’hui il pleut pas, mais promettez moi d’essayer demain. »
Chaque matin on se lève en ayant des tonnes de projets et de rêves un peu fous que l’on aimerait concrétiser. Tel un enfant, on allume les lumières qui dorment dans nos yeux et on prend le chemin de « l’école » avec sous le bras, ces idées d'un monde un brin gris/noir à transformer en un univers intergalactique beaucoup plus coloré. On s’en va avec un sourire grand comme une galaxie étoilée, un cœur rempli de rêves inassouvis, de poésies et de mots dessinés à la peinture, aux crayons aux couleurs feu d’artifice.
On avance en tenant bien en main, nos secrets, la construction d’une fusée, un voyage, un immense grenier aventure terrain de jeux. On avance parce que croire aux lundis amoureux, aux lundis enfantins, aux lundis poésie est bien plus sympa que de croire aux lundis brumeux, aux semaines pas très scintillantes, pas très toute la galaxie, toute la vie.
Chaque matin on essaie de garder un bout de poésie, un bout de lune qu’on accroche à sa journée. On rêve parce que rêver ça mange pas de pain, à la limite ça mange un éclair au chocolat, ça pétille comme une dernière bulle de limonade dans une flute à champagne, ça sautille sur une marelle, ça gribouille de bleu le gris du ciel. Mais surtout chaque matin, on essaie d’essuyer le chagrin de ne pas croire que cela est possible, que de voler vers la lune serait interdit, que de sourire serait triste.
Alors on accroche un peu de rêves à nos bleus de travail, nos bleus à l’âme, un peu de folie utopique que seuls les bien-pensants pensent impossibles. Mais à vrai dire, on s’en fout des bien-pensants. Parce que les bien-pensants justement, ils ne rêvent plus. Et c’est bien dommage de ne plus rêver, de ne plus être des Pierrots lunaires, des Jacques Tati pédalant, des Charlots sautillants.
C’est bien dommage de croire que les lundis ne ressemblent pas à de la crème fouettée, des carrés de chocolats, des bulles de savon légères, des bisous tendres et fortement conseillés. C’est bien dommage de ne pas croire qu’il est possible de s’offrir un voyage vers la Lune alors que tout le monde souhaite partir au soleil. Et pourquoi pas sur Mars tant qu’à faire ! Et puis la Lune, c’est quand même autre chose. Ça a de la gueule. C’est Tintin et puis le Petit Prince qui nous l’on dit, même si voyager à bord d’une fusée rouge et blanche à carreaux comme une nappe de pique-nique, avec un mouton dessiné dans une boite à chaussure, ça reste moins poétique qu’un vaisseau spatial bricolé avec des rouleaux de papier toilette et un moteur d’aspirateur frisant la vitesse du mur du son.
Oui ça serait bien dommage de ne pas lire la poésie burlesque, chantante, douce et tendre de Guillaume Siaudeau. Ça serait bien dommage de passer à côté d’un petit roman au gout d’une belle folie dont on aimerait s’accrocher des ailes pour voler au-dessus du monde, pour nous rappeler l’importance des rêves, du goût des éclairs au chocolat, des bulles de limonades qui restent au fond du verre, des bisous qui tiennent chaud le temps d’une journée ou d’une semaine.
Oui ça serait bien dommage de ne pas rêver, de construire des châteaux de sable sur une plage de pavés, parce que sous les pavés, la plage, de ne pas dessiner un ciel coloré alors que le temps est gris et que le monde autour de nous a oublié son sourire, de construire une fusée. Ça serait bien dommage de ne pas accrocher à sa vie des étoiles, des galaxies, des Toby, des mères au cœur qui fait boum, des copains qui sont un peu bancals mais dont on s’en fout. Ça serait bien dommage de devenir un adulte et de plus croire en rien, et surtout pas à la poésie, la lune, les rêves d’enfant les plus fous. Ça serait bien dommage d’oublier d’être des Charlots, des Pierrots, des Célestines, des qui se prennent les pieds dans le tapis pour mieux s’envoler vers des rêves qui deviennent des feux d’artifices.
« Je ne savais pas qu’il y avait une saison pour les feux d’artifice. N’importe qui devrait pouvoir disposer d’un feu d’artifice n’importe quand. […] Quand quelque chose dont j’ai éperdument envie ne se produit pas, je me console en l’imaginant. J’ai fermé les yeux et je me suis retrouvé les pieds dans la neige, devant le plus beau feu d’artifice qui soit. »
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