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Photo du rédacteurSabine

Guillaume Siaudeau - Inauguration de l'ennui


« Prem’s Le premier rayon celui qui n’a pas attendu les autres Celui qui ne brûle pas encore Qui réchauffe juste un peu juste ce qu’il faut Qui ne ferait pas cuire un œuf sur un capot de voiture Ce premier rayon-là a valeur de sourire »

Il y a des petits livres qui nous arrivent comme ça, comme un cadeau que l'on n'attendais pas. Un jour un peu bizarre, entre deux grisailles, entre une ondée et une éclaircie, viennent nous chatouiller le regard. Ils nous couvrent du regard, se devinent sous les pages, se tournent et se déversent un matin dans une tasse de thé, le soir dans l'assiette de soupe.


C’est de la poésie. Enfin il parait. Parce que la poésie, c'est bien connu, c'est ce quelque chose qui ennuie, ne se lit qu’en vers, rimes, en travers et mélancolie. En un mot, elle barbe.


Et puis, on ne sait pas pourquoi, un jour arrive des mots qui viennent vous susurrer des sons, des joies, des larmes, des trois fois riens, des beaucoup, des peu, des arrières vilains, des je t’aime je te veux. La poésie s’empare de notre esprit, notre âme. On ouvre les yeux, entend les mots coulés, ressent les parfums lus, goute jusqu’à la moelle, l’onctuosité des proses et textes, touche du bout du doigt la tournure de la phrase, le virage d’un point.


La poésie vous a frappé de son temps, de petits moments, de mélancolie, son ennui à rêver, être, créer, se retrouver, dans les rires, les cris, la colère, le silence, la beauté. Un vol.


Et Guillaume Siaudeau a l'art de commettre ce hold-up poétique. D’une plume alerte, mélancolique, souriante, nostalgique, riante, savoureuse, pétillante, dramatique, il écrit où le mot par lui-même devient mélodieux, fin, un brin fou et chantant, une fuite de nos esprits moroses et habitués aux clichés, aux tempérances. Il tricote un canevas, un pull, une prose à l’incroyable saveur, à l’onctuosité parfaite, une ode à l’ennui et aux rêves, à la vie dans ces moments de plus grandes solitudes comme ceux d’un profond amour.


« Les larmes sont comme le linge sur le balcon d’en face Je ne sais pas si c’est la meilleure façon de sécher ses larmes mais voilà 10 bonnes minutes qu’elle a les yeux fixés sur l’étendoir à linge »

Il faut lire, ouvrir ce recueil, savourer cette invitation à entendre chaque mot comme une offrande, un cadeau. Enlever délicatement le ruban qui renferme la prose, le ver, la petite chose qui nous dit que la poésie est autour de nous, dans chaque détail, moment de vie. Elle nous entoure, nous cueille, nous parfume, nous égaie, rend triste, fait pleurer, rire, s’étonner, pleurer, mourir. Elle se chante, se cache, terre, heurte, aime, vole, s’écrie, se bricole, se peint, se hurle, se déclame, se pose.


Elle est un temps, un lieu, une rencontre, un arrêt ou une continuité. Elle est un sourire, une photo, une tasse de café, un match, un clin d’œil, des cerfs-volants, des poings serrés au fond des poches, des aires d’autoroutes abandonnées, des rouges à lèvres assortis aux Dogs-Martens, un équilibre précaire et fragile, un clin d’œil de la vie, des vagues à l’âme, des marées hautes, basses, des gestes tendres ou désorganisés, des falaises, des guerres, des victoires, des défaites.


« Laissons planer le doute Militons pour que les paroles en l’air deviennent des cerfs-volants »

La poésie est une ration de joie et Guillaume Siaudeau est un maitre. Il est le roi de ce que la poésie entraine dans ces sillons, un grand bol de vie, d’air, de cette goutte nécessaire quand la tristesse surgit. (Et il arrive même que la poésie soit une tartine de pain beurré qu’on se ressert tellement la poésie lue est savourée.)


« entretenir la flamme Il y a un feu de cheminée dans ton cœur Chaque jour tu sors couper du bois. »

A découvrir la méduse et le renard, petite boite à surprise que nous offre Guillaume Siaudeau dans les brumes d’une journée de rien, d’une journée de tout. (à ranger au rayon des essentiels juste à côté de Laetitia Cuvelier, Thomas Vinau et Loïc Demey)

« Au four et au moulin Encore une belle journée qui ne prend pas soin d’elle trop occupée avec nous »

Inauguration de l’ennui Guillaume Siaudeau Alma Editeur

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