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Fanny Chiarello, Wendy Delorme - L'évaporée



« Mille fois, j’ai été tentée de la rappeler. Lui demander pardon, lui dire « reprends-moi, je suis folle. J’ai besoin de tes bras ». Mais elle voudra savoir. […] Il me faudra alors lui parler […] Il viendra un moment où j’en serai capable. »

On ne peut éviter une rencontre, une histoire d’amour. Elle s’opère sans qu’on y prenne garde, sans savoir pourquoi. Elle ne peut être sans des morceaux de vie, de complicités, d’unions, d’évidences, d’états, d'ébats, de souvenirs, d'intimités, de rire. Des détails, des envies, des phrases, des mots, des cris, des sourires, des touts, des riens, des trops, des plus, l’intime qui prend corps, devient, s’échange, se construit, se prend, se perd, fuie, se respire, s'enfuie. S'évapore.


On ne peut éviter une rencontre amoureuse. On ne peut savoir.

On ne peut éviter une début, une fin, l’abandon, les manques. Sa cruauté. Son besoin.

On ne peut savoir quand, ni où, les bords, les précipices, les états, la douleur.

On aimerait mais on ne peut.

On laisse, on part, on revient. On y croit.

On attend. On s'évapore.


« Rêver, seule ou à deux, ce n’est pas toujours être dans le vrai. »

Juste entendre les maux, les courses-poursuites, les courses dans la brume, le noir, la nuit pour oublier, les jambes avalant le bitume comme un métronome, une résistance scandant le rythme, les ventres grouillant de crampes, de maux, de douleurs, les mains crispées autour des angoisses, du souffle court, les battements de cœur emportant tout et laissant les sanglots et la tristesse, les cris, les corps, la peine au sol. On ne peut comprendre, trouver de réponse ou faire comme si. Faire comme. Juste comprendre qu’une fois partie, tout est là, tout était là. Traverser. Dans ce moment. Dans la disparition, le manque, la lente érosion des souvenirs, des colères, des tendresses, des pourquoi-comment, des lui, des elle et du manque toujours, encore, plus. Là.


« Je n’ai jamais su quitter. Je n’ai jamais su partir. »

Et un jour, écrire. Ecrire l'histoire, la déchirure, le manque, l'incompréhensible, la douleur. S'effacer, effacer. Ecrire. Déchirer. Ecrire. L'histoire, les mots, le récit, ce qui a été, est, sera. Rester et écrire. Résister. Revenir. Ecrire. Colère et incompréhension. Compréhension. Manque encore. Toujours. Sensibilité accrue, écriture à vif. Couteau. Fragments. Lettre à. Souffle. Soi. L'intime. Souffler. Réapprendre à aimer. Aimer. Essayer. Prendre du recul. Se retrouver. Pour mieux se retrouver. Évaporée. L’évaporée.


« Mes ongles essaient de s'enfuir [...] Pourtant je ne pleure pas et je respire sans raté. [...] Eh bien quoi ? je suis vivante, je vibre, je me cabre, je me rue, je me débats, je hurle, je refuse le silence qu'elle m'inflige. [...] J'ai fait ce que j'ai pu. [...] Aujourd'hui, je ne dis pas seulement au revoir à l'Evaporée mais aussi à la tragédienne qui s'était emparée de moi. Aujourd'hui franchement ça va. » (et relire page 18 et 19)

Écrire à quatre mains. Fanny Chiarello. Wendy Delorme. Une correspondance. Des lettres et mots. Des mails. Des messages. Ecrire. Une histoire. D’amour. L'amour. Fini. Evaporé. La liberté. Sa liberté. Sa vie. Sa foi. Pour tenir. Tomber. Se relever. Devenir. Etre. Ecrire. Toujours. L'écriture comme colonne, comme épine dorsale, souffle, vecteur, moteur, connecteur. L'écriture comme une méditation, une façon de rester droite, verticale, une intimité de soi pour soi, à soi, comme un dialogue avec son corps, avec son ventre, ses tripes, sa foi, un manifeste, pour vivre une fin, la fin, sa fin, la densité de la relation, les remous et tourbillons, les rapports aux textes, aux mots, au récit, à l'histoire. Ecrire à quatre mains. Ecrire à deux. La solitude vécue, la perte, la résistance, la droiture,


« [...] Je sais qu'on peut vivre une même histoire de deux façons totalement différentes. Et que l'expérience de chaque être en ce monde est une solitude vraiment irrémédiable. »

Composer chapitre après chapitre, mot après mot. Tailler le crayon, s’en tenir au manuscrit, au livre, aux morceaux tissés, à la table ou l’atelier, l’établi. Se pencher sur la littérature, l’édition, la distance, à distance. Entretenir l’histoire, l’intime, le dialogue. Ecrire les souvenirs, les inventer, en faire l’ossature, le corps, son corps, sa trame, sa verticalité. Prendre du passé pour habiter le présent. Ecrire sa propre histoire, rendre le présent possible, le futur devant soi. Écrire.


« L'écriture est peut-être la forme la plus intime de rencontre»

Ecrire.

Parce que tout est là.


Ecrire l’évaporée. A quatre mains. A dix doigts.

Ecrire une histoire. En faire un roman.

L’évaporée.



« On a besoin d’histoire pour que la vie prenne sens. »

« Rien n’est éternel sauf le souvenir, la mémoire des choses, des êtres que l’on aime. »

L’évaporée

Fanny Chiarelllo – Wendy Delorme

Editions Cambourakis

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