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Cyril Pedrosa - les équinoxes


« Je me demande parfois si j’avais réellement si peu besoin des autres, ou si je me tenais à l’écart faute de pouvoir être moi-même au milieu d’eux. Nos discussions ressemblaient à des monologues parallèles. Nous ne partagions sans doute rien d’autre que notre incompréhension mutuelle. Pourtant, de temps en temps, je les rencontrais. Je voyais un corps, un visage, et un court instant, j’entendais leur musique. J’aurais aimé les prendre dans mes bras et leur dire « vous aussi vous avez senti ? Vous avez entendu comme c’était beau ? J’étais tendue vers vous, et j’ai vu quelque chose de juste et de vrai. Quelque chose est arrivé, ici et maintenant, qui ne se reproduira plus jamais. »

J’aimerai vous parler de ce livre, de ce roman qui se lit entre bulles et textes, entre un graphisme et des lettres. J’aimerai mais vous parler des Equinoxes serait mettre des mots de trop sur mes émotions.


Lire Pedrosa, c’est entrer dans l’âme humaine, cette âme si précieuse, si fragile qu’il en devient fort et puissant de le lire, beau, tendre, vivant. Beau dans sa qualité, dans ses silences, dans ce quelque chose qui vient nous chercher loin, qui nous prend la main et nous fait faire le tour du monde, le tour de nous, de nos solitudes, nos absences, de nos vides, besoins, espaces, peurs, courages, de l’amour qui nous reste. Les Equinoxes sont ce paradoxe de ce qui nous reste, ces doutes et pardons accordés, une quête de sens, une recherche de soi, des autres, de l’autre, du monde s’égrainant aux rythmes des saisons, du temps, d’une année.


« Il faudrait tendre la main, passer définitivement de l’autre côté, se sentir coupable et honteux de chercher à survivre. »

Les Equinoxes est l’élan d’ouvrir grand les rideaux après avoir baissé, tiré, occulté les jours heureux. Rien à forcément ou profondément changer dans la vie des personnages rencontrés au gré des pages tournées, mais les bras ballants, la tête et pensées à la dérive, ils vont à la rencontre de ce moi-profond, des autres, d’un regard perdu ou d’une main tendue. L’amour, la passion, l’amitié, le « pas très doué » pour ce qu’on croit être, est ce point d’appui, cette envie fugace d’avancer, de marcher, de courir, de regarder, respirer. Les pensées tourbillonnent, se fracassent sur les vagues de la vie, sur les parois vitrées, les pas égarés, les solitudes, l’ennui, le vide. Et puis au détour, d’un regard, d’une photo volée par celle qui les voit, la vie s’infiltre. Les figures invisibles, abstraites deviennent chair, corps, animés de désirs, de foi, d’envies telles ces saisons qui s’éveillent après la lente érosion, l’hibernation des jours gris, brumeux.


« Pourquoi faut-il porter sa vie avec soi comme un spectacle éphémère et invisible aux autres ? »

Les Equinoxes donnent vie à ses personnages croisés le temps d’un instant fugace, de personnages ni plus beaux, ni plus forts que d’autres, courageux, mais qui possèdent cette forme de noblesse propre aux invisibles, à ceux qui tombent, se relèvent, se révèlent, buttent pour rester en vie, rient à tout moment, tombent amoureux à chaque instant, s’accrochent, se raccrochent, penchent, foncent, se déploient, savent que la beauté est dans la lutte, dans la beauté qui font se tenir debout, qui font, donnent vie.


« Il faut que je réduise mon ego. Ne plus me laisser envahir par ce que je ne suis pas. Je bute tous les jours sur le mur insupportable de mes limites, et pourtant je continue. Comme sur un vélo. Si je m'arrête, je tombe. »

Tel le temps qui passe, les équinoxes donnent vie aux âmes solitaires, nostalgique, aux destins qui se croisent. Et ne pas savoir en parler est peut—être se qui définit le mieux le roman graphique de Cyril Pedrosa.


« Je ne sais pas comment tu fais. Pour avoir envie d'adoucir le monde. J'ai l'impression que c'est comme...vouloir détourner le cours d'une rivière...en y déposant des grains de sable, un par un. »
« Je voudrais qu'on me pardonne mes erreurs, mais personne ne peut le faire. Il faut se contenter de son propre pardon. »


Les équinoxes

Pedrosa

Aire Libre



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