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Arnaud Dudek - Rester sage



Une dizaine d’années plus tard, quand Martin analysera à froid sa haine des touristes et ses choix professionnels incongrus, quand, vissé à une copie de fauteuil Louis XV, dans une pièce qui empeste l’encens et les remords, sous le regard bienveillant d’ne autre thérapeute d’âge indéterminé, il tentera de comprendre pourquoi son licenciement l’a anéanti, pourquoi il a eu le sentiment qu’on tuait une seconde foi sa mère en le mettant sur la touche (rien que ça), il comprendra que même si tous les monsieur Démonté du monde ne deviennent pas kinés, même si tous les voyagistes de la planète ne jouent pas à Œdipe et Jocaste en signant leur contrat de travail, nos choix se sont jamais totalement anodins. »

« Je m’appelle Arnaud à cause d’un film dans lequel jouaient Bourvil et Adamo et j’aurai bientôt trente-trois ans. […] Oh je sais, ça arrive à des gens très bien de vieillir. Mais doit-on accepter comme tout le monde ? […] Moi je consens à vieillir mais j’essaie de lutter. A ma manière. L’émerveillement est ma bouffée d’oxygène. Vieillir oui, mais en laissant fondre des bonbons sous ma langue. Demain, après demain l’année prochaine, je toucherai à des buts sans intérêt. […] Mais cela n’aura aucune importance. Parce que mes yeux pétilleront sous un ciel zébré de feux d’artifice. Parce que mes papilles danseront avec un bœuf bourguignon cuisiné à la perfection. Parce qu’une phrase sonnera tellement juste, page quatre vingt deux. Parce que dix mille petites choses m’enchanteront encore. Et ça me suffira… Tant pis pour les confitures. »


Arnaud DUDEK c‘est une bulle d’air frais, une dérision de notre monde, une malice à chaque page et des mots vrais, la phrase qui d’un seul coup fait que toute cette énumération de choses communes font que bah ouais… il n’y a plus qu’à acquiescer.

Bref je n’y vais pas par quatre chemins… Je suis tombée sous le charme de la plume d’Arnaud DUDEK (chut il ne le sait pas) : ce mec est mon génie. Je me demande d’ailleurs s’il ne sort pas de la lampe d’ALADIN …


Alors parlons de ce roman…


« Martin Leroy a été pendant sept ans employé dans une agence de voyages. Il vendait des circuits Magie du Sud tunisien ou des treks Aventures au Sahara pour randonneur confirmés, assurance rapatriement gratuite en cas de paiement comptant ; il déteste voyager, mais l’un n’empêche pas l’autre. Martin vivait par ailleurs avec Justine, une femme douce et délicieuse, comme souvent. Leur existence était confortable, faite de promenades en forêt, de jus d’orange sans pulpe, de prélèvements automatiques sur compte commun et d’amis assortis au tapis du salon. Martin a tout perdu en quelques semaines. »


Un homme, la trentaine, voit sa vie basculée du jour au lendemain, licencié par son boss (futur retraité) qui décide de vendre son agence de voyage à un groupe diversifié pourvoyeur de Mercurochrome et largué par Justine, sa fiancée, qui l’a plaqué pour un blond et romantique collègue… Vu sous cet angle…

Mais disons que dans ce roman vous trouverez une Opel Corsa plus que défraichie, un pigeon mangeur d’olives vertes, un escalator pas comme les autres, des litres de cafés et de jus de poires ingurgités, des cigarettes de toutes marques, un séjour à Londres brumeux, des personnages plus sympathiques, fous ou régressifs, dépressifs, les uns que les autres et vous vous trouverez VOUS ! Oui, TOI qui lis ce billet. Tu y es aussi. TOI le lecteur… TOI !


Sous les va-et-vient temporels (gardez bien votre boussole-spatiaux intergénérationnelles, ça bouscule), Arnaud DUDEK dresse le portrait d’un homme de son enfance ratée, à sa vie d’homme raté aussi. A l’aide d’une plume ironique, rapide, incisive, imagée et avec une certaine oralité, il laisse une chance aux deux personnages principaux de mettre de la lumière et du brillant dans leur vie.


Et ça fait mouche bien souvent. Digressif mais tendre et malicieux à souhait. Et tout bonnement un coup de cœur ! Tout compte fait j’en suis certaine, Arnaud DUDEK est un génie !


Il est à noter que « Rester sage » est actuellement présenter par une toute jeune compagnie théâtrale, La Compagnie Oculus. J’ai eu la chance de voir une de leur première interprétation-lecture en compagnie de l’auteur et j’attends avec impatience de voir la suite. Prometteur !! Un vrai bain de jouvence !

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