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  • Photo du rédacteurSabine

Aimée de Jongh - Le retour de la bondrée



« C’est tellement agréable d’être au milieu des livres. Je sais, ce ne sont que des objets. Mais plus ces armoires se vident, plus je comprends qu’un nouveau chapitre va s’ouvrir. Un chapitre plein d’incertitudes ».

Il existe en nous des souvenirs d’enfance douloureux, des souvenirs qui nous empêchent d’avancer, que nous tentons tant bien que mal de masquer, d’oublier, traumatismes de nos nuits et silences enfuis dans nos cicatrices invisibles. Ils sont là, comme une arme au dessus de nos têtes, un pistolet imaginaire. On presse sa gâchette, on crève de peur et bang-bang, on meurt dans les pages noires de notre enfance.


« Tu connais la bondrée apivore ? C’est un oiseau très rare qui survit en recommençant à zéro »

Tout commence par une première page terrifiante. Vaste page blanche où se dessine un rapace, une bondée apivore, à l’œil globuleux et au regard acéré. Juché sur un pieu, vieux poteau d’un champ entouré de barbelés, elle se dresse sur ses ergots et seules quelques plumes d’une blancheur absolue créent un mouvement dans cette page à l’inertie inquiétante. L’atmosphère est plantée. L’histoire peut commencer.


Simon a hérité de la librairie de son père. Enfant il n’aurait jamais imaginé un tel destin. Lui qui ne rêvait que d’oiseaux, de vols, de chants, il doit maintenant faire face aux géants des livres et autres sites numériques. Les affaires sont dures et le conduisent à se poser la question de céder la librairie aux profiteurs du « tout culture » véreux.

Un soir où il part se réapprovisionner en livres dans une vieille cabane au fond d’un bois, Simon croise une femme se donnant la mort au passage d’un train. Pour lui, cela sonne le début d’une chute lente et longue vers l’enfance, aux traumatismes, silences et autres non-dits enfouis. A la culpabilité, à ce geste accident, son immobiliste, s’ajoutent ses regrets, sa colère, sa peur, l’incompréhension, l’injustice, la faute commise.

La vie de Simon devient alors un cauchemar à répétition, une lente résurgence de son enfance. L’intervention d’une jeune adolescente croisée sera sa seule soupape de sécurité, son souffle. Mais jusqu’à quand…


« Toute leur vie, ils allaient être rongés par le remords : « pourquoi a-t-on fait ça… ? Et puis aussi « Que se serait-il passé si… ? » »


Dans un graphisme fin et somptueux, un trait épuré, pointilleux en noir et blanc-encre de chine, utilisant les pleins, les vides, les grands espaces pour noircir et rendre la page d’une tension palpable, Aimée de Jongh nous amène à la rencontre des traumatismes de l’enfance. Une descente aux enfers magistralement orchestrée. Un scénario qui ne lâche rien et nous mène dans un vrai roman graphique noir, très noir. Absolument dantesque, génial et poétique, tendre. Une intrigue qui côtoie le présent et l’enfance sans laisser le moindre soupçon sur la page suivante. On tourne fébrilement les planches et on plonge dans ce noir et blanc dramatique.


« Parfois il faut recommencer à zéro pour survivre ».


Le retour de la bondrée

Aimée de Jongh

Dargaud


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